UGO RONDINONE
VOCABULARY OF SOLITUDE, 2014 - 2016
polystyrene foam, epoxy resin, fabric
BE. BREATHE. SLEEP. DREAM. WAKE. RISE. SIT. HEAR. LOOK. THINK. STAND. WALK. PEE. SHOWER. DRESS. DRINK. FART. SHIT. READ. LAUGH. COOK. SMELL. TASTE. EAT. CLEAN. WRITE. DAYDREAM. REMEMBER. CRY. NAP. TOUCH. FEEL. MOAN. ENJOY. FLOAT. LOVE. HOPE. WISH. SING. DANCE. FALL. CURSE. YAWN. UNDRESS. LIE.
La tristesse et la peur se baladent, elles sont juste à côté, elles observent, elles errent. Rien de grave ne peut arriver. All is on control.
La tristesse et la peur flottent autour de nous, nous emballent, parfois même nous frôlent et nous traversent. Ces émotions, maladies et leurs symptômes sont le fruit de l’histoire individuelle ainsi que des histoires collectives que nous partageons.
Les récits quotidiens se ponctuent souvent par « c’est déprimant ! »
Aujourd’hui est grave. Comme tous les autres jours, est-il plus grave qu’hier et qu’ailleurs ?
La tristesse et la peur sont invisibles, pourtant elles sont partout. Elles sont aussi là tout près de nous dans le langage, ce climat qui s’installe sans faire de bruit et qui accompagne la/les catastrophe/s.
Pleurons ensemble et en joie.
Car la tristesse et la peur sont aussi sources de richesses…
Je voudrais une fois leur donner une place, les mélanger au reste de la vie. Leur donner un visage, leur ériger une statue. Prenons soin d’elles et gardons les près de nous. Bien qu’elles soient lourdes à porter, elles nous permettent de voir et ils* ne devraient pas pouvoir en profiter.
*les grands méchants loups.
Le matin sur leur deux roues,
tout le monde se frotte les yeux et pleurs.
EDVARD MUNCH
LE CRI, (cinq versions réalisé entre 1893 et 1917)
Symbolisant l'homme moderne emporté par une crise d'angoisse existentielle.
« Je me promenais sur un sentier avec deux amis — le soleil se couchait — tout d'un coup le ciel devint rouge sang. Je m'arrêtai, fatigué, et m'appuyai sur une clôture — il y avait du sang et des langues de feu au-dessus du fjord bleu-noir de la ville — mes amis continuèrent, et j'y restai, tremblant d'anxiété — je sentais un cri infini qui passait à travers l'univers et qui déchirait la nature. » (22 janvier 1892, journal de E. Munch)
Le bonheur se construirait, s’enseignerait et s’apprendrait : telle est l’idée à laquelle la psychologie positive prétend conférer une légitimité scientifique. Il suffirait d’écouter les experts et d'appliquer leurs techniques pour devenir heureux. L’industrie du bonheur, qui brasse des milliards d’euros, affirme ainsi pouvoir façonner les individus en créatures capables de faire obstruction aux sentiments négatifs, de tirer le meilleur parti d’elles-mêmes en contrôlant totalement leurs désirs improductifs et leurs pensées défaitistes.
Mais n'aurions-nous pas affaire ici à une autre ruse destinée à nous convaincre, encore une fois, que la richesse et la pauvreté, le succès et l’échec, la santé et la maladie sont de notre seule responsabilité ?
Et si la dite science du bonheur élargissait le champ de la consommation à notre intériorité, faisant des émotions des marchandises comme les autres ?
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